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French Literature

of the 19th & 20th Centuries

Arthur Rimbaud (1854-1891) : Ivresse et dérive

L'oeuvre de Rimbaud reste une somme exceptionnelle de la littérature du 19e siècle, pourtant, elle ne comprend qu'une centaine de pages d'un mince volume. Ses textes, poèmes et prose poétique, Rimbaud les a écrits entre quinze et vingt et un ans; ils expriment la révolte, l'ironie grinçante de sa jeunesse mais aussi une aspiration profonde à un autre monde. En dépit de son bref passage en littérature, Rimbaud a suscité des centaines de commentaires et exégèses, inspiré de nombreux auteurs, mais s'il "est le père de bien des écoles, il n'est le parent d'aucune" (Henry Miller).

Comme celle de Baudelaire, l'enfance de Rimbaud à Charleville (Nord) est un cauchemar, entre un père officier de carrière et une mère "aussi inflexible que soixante-treize administrations à casquettes de plomb." Sa première fugue a lieu à seize ans, il est arrêté dans le train pour Paris et emprisonné faute d'avoir assez d'argent pour son billet. D'autres fugues suivent bientôt, en octobre 1871 en Belgique, à nouveau à Paris en février et mars 1871. Dans une lettre de mai 1871, Rimbaud décrit à son ami Paul Demeny la manière dont il conçoit la création poétique : "Je dis qu'il faut être voyant, se faire voyant. Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens."

C'est à cette période que Rimbaud rédige Le Bateau ivre, long poème exalté exprimant l'ivresse de la dérive. Au mois de septembre de cette même année, il rencontre Paul Verlaine à Paris, où il vivent ensemble une existence de débauche, qui se prolonge également à Londres, au cours de plusieurs séjours. En juillet 1873 à Bruxelles, Verlaine, tentant de retenir son ami, blesse Rimbaud d'un coup de revolver. Verlaine est emprisonné pour deux ans. Rimbaud relate cet épisode troublé de sa relation avec Verlaine dans un recueil achevé en août 1873, Une Saison en enfer. Ce recueil est aussi un sévère réquisitoire du monde contemporain, dans lequel Rimbaud montre sa haine envers les institutions bourgeoise, militaire et cléricale qui le soutiennent.

Rimbaud cesse d'écrire vers 1875, Les Illuminations (publié en 1886) contiennent ses derniers poèmes, qui apparaissent comme des "visions", pour la plupart quasi-hermétiques. Rimbaud est le seul maître de ces tableaux féeriques, hallucinés, de ces images prises du réel au cours de ses pérégrinations et recyclées dans un imaginaire fantasque qui porte la poésie vers une nouvelle dimension, celle du chaos et du splendide insensé.

A partir de l'automne 1873, Rimbaud voyage beaucoup en Europe, exerçant différents métiers, dont celui d'employé de cirque. Il s'embarque pour l'Afrique en 1878, où il tente de faire fortune dans le commerce, y compris d'armes, mais sans succès. En 1891, une tumeur au genou l'oblige à rentrer en France et à se faire amputer d'une jambe. Incapable de supporter ce retour, il tente de repartir, mais il meurt à Marseille, dans d'horribles souffrances.

Rimbaud a probablement été plus lu pour le mythe qu'il représente que pour ses oeuvres, d'une consternante difficulté. Pourtant, dans ce déluge rimbaldien, cette déconstruction de l'espace littéraire traditionnel, celui du sens, des thèmes émergent, ceux de la révolte, du goût pour la vie, de l'expérience des sensations, de la débauche salvatrice et illuminante. Tous ces thèmes convergent vers "le langage de l'âme" (Henry Miller) d'un poète à l'existence et au génie fulgurants.

© Denis C. Meyer-2009

 

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