top of page

French Media
& Advertising

La presse française

Le rôle de la presse écrite dans les pays démocratiques a toujours été important, à tel point qu'on a appelé cette presse le "quatrième pouvoir", dont une des fonctions principales - à part d'informer - est d'observer de manière critique les trois autres pouvoirs : le législatif (les parlements), l'exécutif (le gouvernement) et le judiciaire (les tribunaux). En France, où le rôle de l'Etat dans les affaires publiques du pays a toujours été considérable, le rôle de la presse comme instrument critique du pouvoir a été d'autant plus grand.

La liberté d'action et d'expression des journalistes a été limitée par le gouvernement jusqu'à la IIIe République (1871). En général, les journalistes devaient se contenter des informations qu'ils obtenaient de sources officielles. Les journalistes ont donc developpé un rôle de commentateur de cette information, le plus souvent critique. Après 1881, une loi sur la liberté d'expression donnait aux journalistes une réelle indépendance vis-à-vis du pouvoir, mais le rôle critique qu'ils s'étaient assignés est resté. En fait, il semble que le commentaire et l'expression des idées aient pris plus d'importance que le compte rendu d'information et le reportage. Le journalisme prestigieux, admiré, est celui du commentaire. En même temps, les qualités littéraires des articles sont plus appréciées et mises en avant que le contenu objectif de l'article, ou la simple relation des faits. Le lecteur cherche même la subjectivité de l'auteur d'un article, son opinion, sa capacité à convaincre par des arguments bien organisés. Ce n'est pas un hasard si de nombreux journalistes sont aussi des écrivains.

Malgré l'importance de ce rôle traditionnel de la presse comme observateur critique de l'Etat, la France est actuellement un pays où on lit relativement peu de journaux, en comparaison à la situation chez les voisins européens. En 1914, il existait 80 titres de journaux à Paris et 242 en province. Les Français étaient alors parmi les plus grands lecteurs de journaux du monde, après les Etats-Unis. Or depuis cette date, les lecteurs, comme les titres de la presse, n'ont pas cessé de diminuer. Aujourd'hui, environ 30% seulement de la population française lit régulièrement un quotidien. En 1988, on ne comptait plus qu'une dizaine de quotidiens nationaux, et 65 titres régionaux.

Il existe plusieurs explications à cette désaffection du public pour la presse. D'abord, au cours des deux guerres que l'Europe a connues, la presse a dû se soumettre à des régimes sévères de censure qui lui ont retiré beaucoup de sa crédibilité, même lors du retour à la paix. Ensuite, les apparitions de la radio, à partir des années trente, puis de la télévision, dans les années cinquante et soixante, ont accéléré ce processus de déstabilisation de la presse quotidienne d'informations générales. Les journaux devenaient en effet "en retard" sur l'actualité et dans l'impossibilité de résister à la concurrence de médias plus "en phase" avec les événements. La presse quotidienne régionale a par contre mieux résisté, car les lecteurs trouvent dans un journal local ce qu'une chaîne de télévision nationale ne peut pas fournir : la proximité.

Malgré cette baisse de popularité, la presse a conservé, renforcé même, son rôle d'analyste et d'observateur précisément grâce à la distance qu'elle maintient par rapport à l'actualité. Ceci explique en partie la forte popularité en France de la presse hebdomadaire, qui compte plus de 3000 titres! Cette presse, qui privilégie l'analyse et le journalisme d'enquête, est également très spécialisée. Plus de 90% de la population en France, dont une majorité de femmes, lit régulièrement des magazines, ce qui place ce pays parmi les plus gros consommateurs de magazines du monde. Curieusement, parmi les dix magazines les plus vendus, sept sont consacrés à la télévision, deux aux femmes (Femme Actuelle et Fémina Hebdo) et un seul à l'information générale (Paris-Match).

De nombreux problèmes empêchent le développement de la presse : ses revenus publicitaires sont faibles (40% en France contre 70% aux Etats-Unis); les coûts salariaux sont élevés, ce qui rend l'achat à l'exemplaire relativement cher; enfin, les Français préfèrent acheter leurs journaux dans les kiosques ou chez leur libraire plutôt que d'utiliser la formule de l'abonnement et de la livraison à domicile.

Sources : Ministère des Affaires Etrangères, Label France;
G. Mermet, Francoscopie 2001, Larousse, Paris.

 

 

 

La presse française vue de l'étranger

Des correspondants de la presse étrangère en France s'expriment sur la presse française :

NHK, Japon :

Aux Etats-Unis, les journalistes des grandes chaînes de télévision sont plus respectés que ceux de la presse écrite. En France, c'est le contraire. Les journalistes de la presse écrite, comme ceux du "Monde" par exemple, travaillent différemment des Japonais. Ils s'attachent principalement à analyser, commenter, donner leur opinion sur tel ou tel événement ou déclaration. Parfois, ils organisent des débats dans les colonnes du journal. La moitié du contenu de vos journaux s'apparente à une revue [...] Vos journaux télévisés ne présentent pas beaucoup d'intérêt à mes yeux. Nous n'en reprenons jamais grand chose car les sujets sont traités de façon trop superficielle. J'ai le sentiment que votre télévision a renoncé à concurrencer la presse écrite...

Daily Mirror, Angleterre :

A lui seul, le "Canard enchaîné" fait le travail que devraient faire quatre ou cinq journaux français... C'est tout dire sur la qualité de l'investigation de la presse française [...] J'ai constaté, par ailleurs, un manque total de compétitivité entre les quotidiens. Leurs patrons raisonnent comme si leurs lecteurs n'achetaient qu'un seul journal.

The Times, Angleterre :

Il n'y a qu'en France qu'on se permet de débuter son article par une citation d'un philosophe du XVIIIe siècle. Tradition littéraire oblige. Je crois aussi que mes confrères français préfèrent commenter plutôt qu'enquêter vraiment. La télévision aussi a ses défauts. On y passe son temps à tourner autour du pot sans donner l'information. Les présentateurs télé font beaucoup trop de baratin. C'est amusant bien sûr, de voir les invités du jour commenter les événements, mais honnêtement, ça n'apporte pas grand chose.

Corriere della Serra, Italie :

Au-delà de la politique, de l'économie et des grands sujets en général, on ne sait jamais, en lisant les journaux, ce qui se passe vraiment en France. On ne dit jamais que quelqu'un est mort d'une overdose d'héroïne à Belleville par exemple... Je ne comprends pas pourquoi les journaux français n'arrivent pas à parler de ces choses-là. A côté de cela, vos journaux sont pleins d'état d'âme, d'opinions... Le journalisme d'enquête est très limité. [...] La télévision? C'est encore une autre histoire... En principe, les chaînes publiques devraient rendre un certain service. Il n'en est rien, et on assite de plus en plus à un dérapage du public vers le privé, dû à la course à l'audience.

 

Source : Les Dossiers du Canard Enchaîné, Les Français vus d'ailleurs - Made in France - juillet 1993

© Denis C. Meyer-2009

bottom of page